La lecture d’un livre: Taxi de Khaled Al Khamissi paru en 2007 va nous conduire en Égypte, au Caire. Il nous permet de comprendre la situation dans le pays à la veille du Printemps Arabe et d’évoquer quelques souvenirs personnels.

Au Caire, se déplacer en taxi est facile, économique, souvent cocasse .Il y a 80000 taxis qui vous prennent là où vous êtes et vous conduisent à petite vitesse vers votre destination. Il s’agit généralement de Fiat bringuebalantes, de 504 ou de R12 ayant fait plusieurs tours de compteur, peintes en noir et blanc. Le compteur kilométrique obligatoire n’est en fait qu’un élément de décoration encombrant, caché sous un tapis qui couvre tout le tableau de bord. Le prix, très bas, se négocie toujours au départ. Les « Cairotes » s’entassent à quatre ou six dans des « taxis commoun » en jaune et noir. Les touristes se font généralement avoir, mais c’est de bonne guerre, et de toute façon, le prix reste quatre à cinq fois moins cher qu’un taxi parisien. Le chauffeur est soit très âgé, soit jeune diplômé au chômage et l’un et l’autre ont toujours du mal à joindre les deux bouts. Voyager ainsi fournit l’occasion unique de rencontrer le peuple égyptien
Dans TAXI, l’auteur rapporte avec tendresse, humour et poésie ses conversations avec des chauffeurs de taxis du Caire. A cette époque, Moubarak essaie de solliciter les égyptiens pour un cinquième mandat à travers des élections pseudo-démocratiques.
Des discussions courtes, franches et directes permettent au lecteur de découvrir simplement tous les tourments de la vie quotidienne subies par la population. Ces conditions de vie conduisent inexorablement au « printemps arabe », puis à l’arrivée au pouvoir des Frères Musulmans avant que le pouvoir ne soit confisqué par l’armée.

Chaque conversation permet à travers une anecdote, de décrire : les difficultés pour se procurer la nourriture de base voire même plus simplement de l’eau; le système débrouille pour survivre bien souvent en exerçant deux voire trois métiers; la complexité des relations avec une administration tatillonne où le détenteur du tampon ou de l’uniforme exige à chaque étape sa commission que complétera un salaire misérable et nous permettra d’éviter le mot corruption; la pollution, l’hygiène, le trafic: les problèmes endémiques des grandes villes égyptiennes; les relations au sein du couple et le rôle de la femme : incontournable! Mais aussi diabolisée; une grande interrogation: l’arrivée des Frères Musulmans au pouvoir ? L’apparition du téléphone portable et de l’internet qui bouleverse le mode de communication et plombe le porte-monnaie; la défaillance du système d’enseignement qu’il faut compenser par des cours privés onéreux et donc inaccessibles pour la plupart; le sentiment d’abandon total par le gouvernement et le passage progressif d’une période heureuse ou plutôt fataliste au règne de la haine envers les puissants et les riches.
Extrait : « On a déjà tout essayé. On a essayé le roi, ça n’a pas marché. Après on a essayé le socialisme avec Nasser et, même au plus fort du socialisme, il y avait encore les pachas de l’armée et des renseignements. Ensuite on a essayé le centre puis le capitalisme, mais un capitalisme avec des produits subventionnés, un secteur public, la dictature et l’état d’urgence… En plus, on est devenus américains…Et ça ne marche toujours pas. On pourrait bien essayer les Frères Musulmans, voir si ça fonctionne. De toute façon on a rien à perdre. »

En conclusion, un documentaire franco italien présenté au cours de l’été 2013 sur les chaînes de télévision Tahrir, Place de la Libération complète la lecture de Taxi. Il nous permet de suivre trois étudiants en février 2011 en train de faire la révolution. Ils occupent la place Tahrir jour et nuit, ils expriment tout ce qu’ils n’ont pu dire à haute voix jusque-là, c’est un espace de liberté où l’on s’enivre de mots, une chronique au jour le jour de la révolution, aux côtés de ses protagonistes.
François Lenglet d’après Khaled Al Khamissi 02/2013
Référence: Taxi de Khaled Al Khamissi éditions Actes Sud_2013
Souvenirs personnels du Caire
Nous avons vécu au Caire pendant plus de cinq ans au milieu des années 1990, voici quelques souvenirs de ma femme Françoise Lenglet qui était professeur d’Allemand au Lycée français du Caire:
« Un jour, à la sortie du Lycée français de Maadi dans la banlieue sud du Caire, où j’enseignais, je hélai un taxi pour rentrer à la maison. Nous habitions non loin de là, mais en cette fin d’après midi de septembre, il faisait encore très chaud et je n’avais guère envie de faire une marche sous ce soleil brulant.
Un taxi ne tarda pas à s’arrêter. C’était une très vieille Fiat , le chauffeur me fit un large sourire et m’ouvrit vite la porte. Je montais sans tarder pensant que les fenêtres grandes ouvertes de la voiture allaient provoquer un courant d’air rafraîchissant. Mais très vite je compris que les fenêtres ouvertes à l’avant servaient à autre chose. La voiture hors d’âge affichait 347.000 km au compteur et avait perdu ses clignotants « à bras » depuis longtemps. Le chauffeur Galal tendait le bras gauche pour signaler un virage à gauche et avant de tourner à droite, il me disait tout simplement * « ya Seta, al yemin menfadlak » « Madame, à droite s’il vous plait » et c’est ainsi que, en tendant le bras droit, je servais de clignotant…ce qui m’amusait beaucoup quand je songeais aux nombreux gadgets techniques de nos voitures modernes.
Galal était joyeux, plein d’humour et devint mon chauffeur pour aller au travail pendant cinq ans. Il n’eut jamais aucun retard, son véhicule était entretenu tous les vendredis par un ami qui habitait « la cité des morts »(l’ancien cimetière) du Caire. La voiture résista et je n’ose imaginer son kilométrage à la fin de mon séjour…Galal m’apprit un peu d’arabe dialectal et d’argot, en retour, je lui enseignais un peu de français …il affirmait être amoureux d’une Française.
Je lui suis reconnaissante de ces moments d’humour et d’avoir facilité mon intégration dans le milieu « baladi » « populaire » du Caire. »
* écriture purement phonétique car je n’ai pas appris à écrire l’Arabe égyptien.
On s’est peut être croisé dans Maadi ,j’y ai séjourné entre 1995 et 1998, je ne prenais pas les taxis mais chaque fois que je me perdais (la nuit) dans Le Caire ils me remettaient dans la bonne direction pour rentrer à Mardi moyennant quelques livres .
PS
Je suis natif de Bertry
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J’ai effectivement résidé rue 9 à Maadi entre 1992 et 1997, j’étais responsable de la filiale de Schneider Electric (E.M.G) à Héliopolis et mon épouse Françoise était professeur d’allemand au Lycée Français. J’étais également conseiller du Commerce extérieur à l’Ambassade. Je n’ai pas de souvenir de votre nom.
Je suis effectivement originaire de Bertry; plus exactement mon père est né à Bertry en 1906 et ma mère à Troisvilles en 1912. Vous avez certainement lu sur mon Blog d’autres articles sur ma famille à Troisvilles jusqu’à la première guerre mondiale.J’espère balayer toute l’histoire de ma famille dans le Cambrésis dans de prochains articles .
Mais par quel chemin êtes vous tombé sur mon site ? A bientôt ….
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Bonjour
je suis tombé sur votre site en consultant le blog de Dominique Lenglet ,ce site parle également du Cambrésis, elle même originaire de Bertry .
Donc j’ai effectué plusieurs missions au Caire pour le compte d’Alstom de 1992 à 1998, j »intervenais pour les essais de signalisation du chemin de fer (Alexandrie/Beni suef) puis lignes1 et 2 du métro.
Je suis arrivé au Caire pour la première fois le jour du séisme en octobre1992 je crois .
Je sais pas si vous faites partie de la famille de Dominique mais avec le même nom…….
Cordialement
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J’étais bien au Caire en Octobre 1992, vers 14h, fin de repas, j’ai cru que j’avais trop bu…Peu de contacts avec Alstom car plutôt concurrents
Dominique est une cousine bien éloignée, nous avons un grand père commun dans les années 1700. Je suis en contact avec Dominique à travers le site Geneanet et nous nous passionnons pour la généalogie: mon site :
https://gw.geneanet.org/fmlenglet46_w?n=lenglet&oc=0&p=francois+marie&type=tree
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